#INTERVIEW - Jonathan Tinhan (31 ans) a décidé de mettre un terme à sa carrière en avril. Après une dernière saison à Grenoble, son premier club professionnel, le champion de France 2012 s'est lancé dans la création de sites internet.
Comment t’est venue la passion du foot ?
En regardant le foot à la télé comme tout le monde et en regardant mon frère jouer. J’ai débuté dans mon premier club à 7 ans, juste pour jouer avec mes copains. Mon ambition de devenir footballeur professionnel est venue très tard, à 18 ans. Avant, le plus important était de jouer avec les copains.
Qu’est-ce qui t'a donné envie de devenir professionnel ?
C’est un peu le franchissement des étapes sans que je m’en rende compte. Le centre de formation de Grenoble a voulu me recruter plusieurs fois. A 14 ans j'ai refusé, ils sont revenus à la charge à 15 ans et j'ai refusé. A l'âge de 16 ans, ils sont de nouveau revenus à la charge et j'ai décidé d'accepter. C'était un peu pour me tester. Je me suis dit « je vais voir si j’arrive à jouer à ce niveau ». La condition était que je reste dans le même lycée car, avec ma mère, on ne voulait pas changer mes habitudes. A 18 ans, j'ai eu mon bac et le club m'a proposé un contrat stagiaire pro. A ce moment, je me suis dit que je n'étais plus très loin du contrat pro et, comme j'avais eu mon bac, j'ai décidé de tenter ma chance dans le football. C'est le seul moment où j'ai lâché mes études pour le football.
Te souviens-tu de ton premier match en pro avec Grenoble ?
Oui je me souviens, c’était à Boulogne-sur-Mer (J2 de Ligue 1, 2009-10, ndr). J'étais excité mais j'avais beaucoup d'appréhension et il faut dire que ça s'est très mal passé. Je n'en ai pas un très bon souvenir. J'étais rentré à 25 minutes de la fin et je n'avais pas fait une bonne entrée en jeu. D'ailleurs je n'ai pas été de retour en match jusqu'à la trêve. Le coach m’avait dit « écoute, je pense que tu n’es pas prêt, tu vas retourner un peu en réserve » (rire). C’est ce qui s’est passé et la deuxième saison s’est beaucoup mieux passée, j’ai fait pas mal de rentrées.
Tu as annoncé il y a quelques semaines la fin de ta carrière. Où en es-tu dans ta reconversion ?
Aujourd’hui, j’ai deux sociétés donc ma reconversion se passe plutôt bien. J’avais repris mes études pendant mes années de footballeur donc je mets maintenant mes diplômes à profit. J’ai ma société de création de sites internet et j’ai aussi ma société de produits cosmétiques et naturels.
On a vu les footballeurs se maintenir en forme pendant le confinement, c’était ton cas ?
Oui, forcément parce que je ne savais pas si les matchs allaient reprendre ou pas donc je me maintenais en forme, je faisais les séances collectives en visioconférence et individuelles. Une fois que la décision de la LFP d’arrêter la saison a été prise, je me suis relâché un peu car je savais que c’était ma dernière saison puis j’ai annoncé ma retraite dans les jours qui ont suivis. Maintenant, j’ai une vie de chef d’entreprise (rire).
Tu disais sur MaLigue2 que tu n’avais pas prévenu tes dirigeants de ta retraite au cours de la saison. Ont-ils été surpris ?
Surpris, oui et non. Un peu forcément. Le confinement a un peu chamboulé les choses, je n’ai pas pu aller les voir en amont pour leur annoncer. J’aurais préféré leur annoncer de vive voix mais ils l’ont appris un peu comme tout le monde même s'ils s’en doutaient car il y avait des bruits qui couraient. Mais j’ai pu les revoir après et leur expliquer. Je garde de très bons rapports avec eux.
Penses-tu que ta reconversion casse certains préjugés sur les footballeurs ?
Oui parce que le footballeur est très stéréotypé. Tout le monde a un peu près le même plan de carrière, c'est-à-dire jouer au foot le plus longtemps possible et, pour la plupart, rester ensuite dans le foot en tant qu’entraîneur, directeur sportif… Quand on a eu une carrière où, entre guillemets, on n’a pas gagné assez d’argent pour pouvoir vivre après, il est évident qu’il faut trouver un métier, une poursuite. Moi j’ai trouvé un milieu qui me passionne et c’est le plus important. C’est un nouveau challenge pour moi et j’ai hâte de le relever.
En 2012, tu inscris un but contre Dijon qui contribue au titre de Montpellier en Ligue 1. Est-ce un but important pour toi ?
Très important. C’est un but que je n’oublie pas et que les supporters de Montpellier m’envoient encore parfois. C’est un but qui a compté dans cette saison historique, celle du titre, donc forcément c’est un but que je n’oublierai pas. En plus, c'est mon seul but en Ligue 1 donc il est marquant et il a servi pour le titre donc que demander de mieux.
Lors de cette saison du titre tu joues peu. Cela reste tout de même un grand souvenir ?
Oui. Pour moi c’est un grand souvenir, dans un club confirmé de Ligue 1. Je sortais de deux saisons à Grenoble où on a été derniers de Ligue 1 et derniers de Ligue 2. Et d’un coup je suis champion de France à Montpellier. C'est un peu le grand saut. Après, cette saison-là, j’ai eu pas mal de blessures et c’était ma première saison loin de chez moi donc c’était un nouveau départ. Mais j’en garde un excellent souvenir même si sportivement je n’ai pas beaucoup joué. Il y a eu le titre de champion puis la Ligue des Champions la saison suivante.
Ces deux matchs contre Schalke 04 et l’Olympiacos sont-ils tes meilleurs souvenirs ?
Oui. La Ligue des Champions, c’est le graal. Tout footballeur veut jouer la Ligue des Champions. Moi j’ai eu la chance de la jouer et ça, personne ne pourra me l’enlever. J’en suis fier. Je garde tous mes souvenirs, j’ai encore tous mes maillots de la Ligue des Champions tout comme celui de champion de France. Ce sont des souvenirs que je garde et qui ont fait ma carrière.
Tu étais jeune, qu’est-ce que ça fait de rentrer pour un match de C1 ?
Rien que quand on entend la musique on a déjà des frissons. Et là on ne l’entend pas à la télé, on l’entend sur le terrain. Franchement c’est magnifique, c’est un aboutissement et je comprends tous les joueurs qui, une fois qu’ils l’ont jouée, veulent tout faire pour la rejouer. C’est vraiment une compétition et un monde à part. Cela n’a rien à voir avec la Ligue 1, c’est à des années lumières des championnats nationaux.
Tu ne t’es jamais imposé en Ligue 1. Est-ce un regret ?
Non, ce n’est pas un regret. C’est simplement un constat, il y a des joueurs qui ont le niveau de la Ligue 1 et d’autres non. Pour ma part je pense que j’étais un joueur de Ligue 2 et que j’aurais pu faire une carrière bien plus pleine en jouant toute ma carrière en Ligue 2. Mais bon, quel joueur n’a pas envie de tenter sa chance en Ligue 1 ? J’ai eu la chance de tenter plusieurs fois, ça n’a pas marché. Je n’ai aucun regret. Il faut être conscient de ses limites.
Pourquoi n’es-tu pas redescendu à l'échelon inférieur quand tu jouais moins ?
J'ai eu plusieurs fois des choix à faire. J’aurais pu être prêté ou transféré dans des clubs de Ligue 2 à des moments donnés et à chaque fois j’ai fait le choix de rester en Ligue 1 parce qu’on a toujours envie de tenter sa chance au plus haut niveau. Ce sont des choix assumés.
Tu as évolué la plupart du temps en pointe, où tu as été le plus décisif, mais aussi sur les côtés ou en soutien. Quel poste préférais-tu ?
Avant-centre. C’est la position où je m’exprimais le mieux, où j’étais le plus efficace et où j’étais le plus dangereux aussi pour l’adversaire. C’est un peu mon regret de ne pas avoir joué assez à ce poste. Ma polyvalence m’a servi, je me sentais aussi à l’aise à d’autres postes. Mais c’est vrai que j’aurais voulu m’imposer davantage comme avant-centre.
Quel bilan fais-tu de ta dernière saison comme footballeur ?
Franchement, je ne vais garder que le positif parce que je finis dans mon club formateur. C’est sûr que j’aurais aimé finir en étant plus performant au niveau des statistiques. Mais je sortais de deux ans et demi à Troyes où je n’avais quasiment pas joué donc retrouver le rythme des matchs m’a fait du bien. J’ai retrouvé peu à peu mon niveau mais dans ma tête je savais que c’était ma dernière saison donc c’est sans regret, je ne garde que du positif.
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