#INTERVIEW - Alors qu'on l'avait un peu perdu de vue après son départ en Pologne en 2017, Terence Makengo est de retour en France depuis cette saison. Le joueur formé à l'AS Monaco évolue aux Herbiers, en National 2, dix ans après avoir été le plus jeune joueur de l'histoire du club de la Principauté à signer un contrat professionnel.
Ton père a été footballeur professionnel, est-ce ce qui t'a poussé à devenir footballeur ?
Oui et non. Oui car en grandissant, j'ai vu ce qu'il faisait et ça m'a donné envie de faire comme lui. Mais non car tout petit j'avais déjà le ballon dans la main donc le fait qu'il ait été pro n'a fait que renforcer ce que j'aimais déjà.
Aurais-tu aimé suivre les traces de ton père, ancien joueur du RC Lens, en portant les couleurs du RCL ?
Oui, j'aurais aimé joué au Racing Club de Lens et c'est un club que j'apprécie beaucoup. Mais ma carrière n'est pas terminée donc pourquoi ne pas jouer au RCL un jour. On verra.
Tu as joué dans plusieurs clubs d'îles-de-France. Ton club de cœur, c'est Paris ?
Non, mon club de cœur reste Monaco ! C'est là où j'ai été formé et où j'ai signé mon premier contrat professionnel. Avec l'INF Clairefontaine, c'est où j'ai appris le métier. Tout le monde aimerait jouer au PSG mais pour moi, mon club de cœur reste l'AS Monaco.
Quels souvenirs gardes-tu de ta formation sur le Rocher ?
Que du bon. J'ai beaucoup appris avec de super joueurs. J'y ai signé mon premier contrat professionnel, j'ai pu m'entraîner avec des joueurs de grande qualité, on a gagné la Coupe Gambardella (en 2011, ndlr) et on a fait des finales U18. Chez les professionnels, il y a eu des hauts et des bas. On est descendus en Ligue 2 donc j'ai connu beaucoup de choses là-bas. C'était très enrichissant.
Les Herbiers
De très grands joueurs sont sortis du centre de formation monégasque. Penses-tu que c'est l'un des meilleurs centres de formation français ?
Clairement oui. C'est vrai que la politique du club a beaucoup changé depuis l'arrivée des Russes mais à l'époque où je jouais à Monaco, c'était un club qui s'appuyait vraiment beaucoup sur les jeunes du centre. Maintenant, il y a plus de stars. Mais c'était l'un des meilleurs centres de formation.
Aurais-tu aimé rester plus longtemps à Monaco ou, d'après toi, tu n'avais plus ta place ?
J'aurais pu rester car le club m'avait proposé de me garder et de me prêter dans un club étranger. Mais je voulais jouer en France donc j'ai fait le choix de partir. Aujourd'hui je n'ai pas de regret même si j'aurais fait les choses différemment avec un peu de recul. J'ai fait ce que je pensais le mieux pour moi sur le moment, mais si c'était à refaire, je le ferais différemment.
Tu viens de rappeler que tu as remporté la Coupe Gambardella. Est-ce ton meilleur souvenir ?
Mes meilleurs souvenirs restent la signature de mon premier contrat professionnel (à 16 ans et 4 mois, N.D.R) et mon premier match en professionnel contre l'Olympique de Marseille. La Coupe Gambardella, c'était quelque chose de très fort parce qu'on était une vraie bande de potes. On avait des joueurs de qualité et on a réussi à aller jusqu'au bout. Ça restera un moment important de ma carrière, mais mon meilleur souvenir restera mon la signature de mon premier contrat car c'est ce qu'on veut tous.
Suis-tu les résultats de l'AS Monaco ? Quel regard portes-tu sur la situation actuelle du club ?
Je suis toujours et je suivrai toujours. Je suis un peu déçu de comment se passe la saison du club mais je suis sûr que Thierry Henry arrivera à redresser la barre. Il y a des recrues qui sont arrivées donc je suis certain que le club fera le maximum pour se redresser. Je ne me fais pas trop de souci mais je suis un peu triste de voir l'AS Monaco dans cette situation. Mais il ne faut pas se faire de souci, ça va le faire.
Tu avais déclaré que Thierry Henry était ton idole il y a quelques années. Que penses-tu de son retour ?
Je suis très content car c'est le joueur que j'appréciais le plus. C'est sa première expérience en tant que coach principal mais il connaît très bien le football. Mais même si gérer un groupe est totalement différent, je pense que ça va bien marcher car il a un bon groupe à sa disposition.
Quel regard portes-tu sur la première moitié de ta carrière ? En es-tu satisfait ?
Satisfait, non car je sais que je peux faire beaucoup mieux. Je ne suis pas là où je devrais être. Mais à un moment donné, si je suis là, c'est que je dois aussi en faire plus. Le foot va très vite dans les deux sens : aujourd'hui je suis là, demain je serai peut-être plus haut. En tout cas je ne lâcherai pas, je continue à travailler et je ferai les comptes à la fin de ma carrière.
En rebondissant aux Herbiers cette saison, tu te fixes un objectif en particulier ?
Pour l'instant je suis aux Herbiers où il y a un bon projet. Remonter va être compliqué mais rien n'est impossible. Je vais finir la saison ici puis on verra ensuite. Je discute avec les dirigeants mais rien n'est fait, je ne sais pas si je vais rester ou partir. L'important était de revenir en France pour rejouer car j'avais eu une grosse blessure l'année dernière, et de reprendre confiance, de marquer des buts. Je m'assiérai autour d'une table avec mes dirigeants en fin de saison et on fera un bilan.
Pourquoi le choix des Herbiers l'été dernier ? As-tu eu d'autres pistes ?
Oui j'ai eu d'autres pistes en France, même un peu plus haut en National. A l'étranger aussi mais je n'avais pas envie de repartir. Le discours du coach m'a beaucoup plu car il m'a expliqué la façon dont il voulait m'utiliser. Le projet m'a plu aussi. J'avais envie de jouer et d'aller dans un club avec des garanties de temps de jeu même si c'est à moi de faire le boulot. J'ai vraiment senti un désir du coach de m'avoir donc c'est pour ça que j'ai fait ce choix.
Tu as joué avec les équipes de France jeunes, est-ce un regret de ne jamais avoir joué avec les A ?
J'ai fait le Tournoi de Toulon aussi. C'était un objectif car j'ai fait toutes les sélections de jeunes. Forcément j'avais envie de continuer comme ça et de connaître le niveau plus haut. Mais quand on commence à descendre de niveau, c'est compliqué de goûter à l'Equipe de France. Ça paraît très loin mais on ne sait jamais, on verra dans le futur. Dans ma tête, rien n'est fermé. Je suis un gosse, je continue à rêver.
Tu as signé un contrat pro très jeune et as connu les équipes de France jeunes. Que t'a-t-il manqué selon toi pour jouer au plus haut niveau ?
Quand on signe tôt, c'est un peu difficile car on pense qu'on y est arrivé. Mais je pense que j'ai manqué d'un peu plus de consistance dans le travail, d'un peu plus de discipline et de rigueur. C'est bien de le comprendre, vaut mieux tard que jamais. Mais quand la chance est passée, les gens n'ont pas forcément envie de te tendre la main à nouveau. C'est le monde du foot qui est comme ça.
Que peux-tu apporter à tes coéquipiers en tant qu'ancien joueur du monde professionnel ?
J'essaie d'apporter mon expérience et ce que j'ai appris tactiquement au collectif. Je tente d'amener de la rigueur et du travail à mes coéquipiers. Je pense qu'on est écouté dans le vestiaire lorsqu'on a joué là-haut car on a un peu de crédibilité. Donc c'est ce que j'essaie d'apporter au groupe au quotidien.
Qu'est-ce que cela peut t'apporter de jouer à ce niveau ?
Ça endurcit. Ça apprend surtout de l'humilité car cela montre que rien n'est acquis dans le football, il faut rester humble et profiter du moment car ça va très vite. C'est surtout dans l'état d'esprit. On se rend compte que ceux qui jouent en haut ont énormément de chance et si un jour j'y retourne, je ferai tout pour ne pas redescendre parce que c'est beaucoup plus dur en bas.
As-tu pensé à arrêter le foot avant de signer aux Herbiers ?
J'y ai pensé à un moment car, pour moi, je ne suis pas là où je devrais être comme je l'ai déjà dit. J'ai pensé beaucoup de fois à arrêter parce que c'est dur. Je ne suis pas quelqu'un qui me compare aux autres mais ça touche un peu à son ego de voir que d'autres personnes qui ont moins de qualité que toi réussissent. Je vois aussi des amis réussir et j'aimerais être avec eux. En ce moment, c'est une période où je réfléchis beaucoup. Mais j'aime le foot alors je ne vais pas lâcher, je vais continuer et j'espère vraiment retrouver le plus haut niveau.
As-tu encore des contacts avec ces amis qui jouent au plus haut niveau ?
Oui, toujours. J'ai des amis qui jouent plus haut, avec qui j'ai été formé à Monaco ou avec qui j'ai joué en Equipe de France et avec qui j'ai toujours des contacts. Puis que tu joues plus haut ou plus bas, ça ne change rien à l'amitié.
Y-a-t'il de grandes différences entre le football pro et le football amateur ?
Oui, ce n'est pas le même sport. Le football professionnel est un football beaucoup plus tactique, beaucoup plus réfléchi, le jeu est déterminant dans les 30 derniers mètres et c'est l'endroit où il y a le plus d'intensité alors que c'est un peu plus "tranquille" dans la zone de préparation. Dans les niveaux inférieurs, tu dois être à fond tout le match car il n'y a pas beaucoup de temps morts. Il y a une grande intensité tout le temps.
En dehors du sportif, sens-tu une grande différence dans la préparation des matchs ou l'organisation des clubs ?
C'est un tout. Dans les clubs professionnels, on est chouchoutés, tout est fait en sorte pour que les joueurs aillent bien avec une grosse structure autour des joueurs que ce soit au niveau des intendants ou des médecins, du staff... Et c'est vrai qu'en N2 on est un peu plus livrés à nous-mêmes et il faut se prendre en main.
French Touch
Quel bilan fais-tu de ton début de saison ?
Sur la première partie de saison, j'ai mis 5 buts. Comme je l'ai dit, je revenais d'une grosse blessure et ce dont j'avais envie était de retrouver le chemin des filets, le terrain et le groupe. Je sais que j'aurais pu faire mieux mais je suis quand même content d'avoir pu retrouver un groupe et surtout de ne pas avoir eu de blessure durant cette première moitié de saison. Je pense que ça va aller encore mieux durant la seconde partie de saison puis je serai au top la saison prochaine.
Collectivement, c'est assez compliqué (11e sur 16 après 15 journées). Quel est l'objectif de la fin de saison ?
En début de saison, l'objectif était de monter. Pour ça, il y a eu une recrutement assez conséquent avec beaucoup de joueurs qui ont joué au plus haut niveau. Mais on s'aperçoit que le National 2 est un championnat très difficile et qu'il ne suffit pas simplement d'empiler les bons joueurs expérimentés pour remonter. Le plus important est de prendre les matchs les uns après les autres et de ne pas tirer de plan sur la comète. Le N2 est un championnat à ne surtout pas sous-estimer et il ne faut pas se voir trop beaux.
L'effectif est effectivement composé de joueurs expérimentés (Matthieu Chemin, Charly Charrier, Oumar Pouye ou encore Tiécoro Keïta ont joué au moins en Ligue 2). Comment expliques-tu vos difficultés ?
On manque peut-être d'humilité car on sait qu'on est plus forts mais on ne fait pas forcément ce qui faut. On ne fait pas les efforts nécessaires pour gagner les matchs et même si on n'est jamais dominés et qu'aucune équipe nous fait vraiment peur, on ne gagne pas les matchs. A nous de se remettre en question. Il ne suffit pas d'avoir le niveau. C'est un tout : c'est un état d'esprit, avoir envie, se battre pour les autres... Je pense que ça servira aussi au club qui a pour projet de remonter dans le futur recrutement et puis nous aussi ça nous servira car c'est une expérience.
Vous êtes toujours en course en Coupe de France. Vous êtes-vous fixés un objectif ou prenez-vous les matchs les uns après les autres ?
L'objectif était d'arriver en 32e de finale et on est qualifiés pour les 16e de finale donc l'objectif est atteint. Désormais, on va prendre les matchs les uns après les autres. On joue Villefranche, une équipe de National, et je pense qu'il y a possibilité de se qualifier. On va aborder ce match comme on a abordé les autres avec confiance et sérénité pour essayer de passer encore un tour sans se mettre la pression de retourner en finale.
Toi qui as joué plus haut, trouves-tu que les clubs amateurs donnent plus d'intérêt à la Coupe de France ?
Oui j'ai l'impression que ça représente un plus gros intérêt chez les clubs amateurs car on a envie de battre les équipe qui sont là-haut. Il y a une réelle envie de montrer qu'on est peut-être amateurs mais on n'a rien à vous envier. Et c'est vrai qu'il y a un plus grand intérêt de la part des clubs inférieurs.
Quel est l'intérêt pour un club amateur d'aller loin en Coupe de France ?
Ce sont des matchs intéressants car tu affrontes des équipes que tu n'auras sans doute plus l'occasion d'affronter dans ta carrière et ça permet aussi à certains de se faire remarquer par des clubs pros. C'est aussi bénéfique pour les finances du club donc pour les clubs amateurs, ce n'est pas mal.
Toi qui as joué en Ligue 2, te fixes-tu l'objectif de rejouer à ce niveau ou as-tu abandonné cette idée ?
Non pas du tout. Je sais que j'ai ma place dans certains effectifs qui évoluent plus haut. Je garde dans un coin de ma tête l'idée de rebondir même si ce n'est pas facile aujourd'hui. Le National 2 est un championnat très compliqué, on peut voir en coupe des équipes de N2 qui éliminent des équipes supérieures. C'est un niveau assez compliqué dans l'impact, dans l'intensité... Je veux continuer à travailler pour revenir à mon niveau après cette blessure. Et rien n'est jamais fini ; tant que je n'arrêterai pas ma carrière, j'aurais toujours des objectifs et des rêves.
Les Herbiers
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