INTERVIEW - Formé au Paris Saint-Germain, Jean-Michel Badiane a accepté de répondre à mes questions. L'ancien défenseur qui a également porté les couleurs de Sedan et du Paris FC revient sur ses premiers pas chez les pros, ses souvenirs sur les terrains ainsi que sur sa relation avec son coach à l'époque, Vahid Halilhodžić.
"Te souviens-tu de ton premier match chez les pros ?
Oui, je m'en souviens très bien. C'était un déplacement à Toulouse même si tout le monde pense que c'était à Nantes, avec le nouveau coach, Vahid Halilhodžić. J'étais bien conscient que c'était compliqué pour les jeunes joueurs du Paris Saint-Germain de jouer en équipe première à l'époque. J'avais eu le temps de me préparer puisque le coach Halilhodžić m'avait annoncé à travers les différentes positions tactiques que j'allais jouer le weekend mais c'était surtout quelque chose de très important par rapport à lui parce qu'il m'avait annoncé que j'aurai ma chance pendant la saison et que je disputerai un certain nombre de matchs. Parce que beaucoup pensaient que c'était impossible pour un joueur du centre de formation de jouer avec l'équipe première du Paris Saint-Germain. Donc beaucoup m'encourageaient à partir et lui a été le seul à me dire de rester, d'être courageux, de continuer à bosser comme je le faisais et que je serai récompensé.
Quelle était ta relation avec ton coach Vahid Halilhodžić ?
Elle était très bonne. Je sais qu'il était souvent décrit comme tyrannique et dur. Je pars toujours du principe qu'un coach qui est trop dur où à l'inverse trop gentil n'existe pas. Il n'y a que les effectifs qui sont conscients - ou pas - de la charge de travail qu'il faut intégrer pour gagner. Moi c'est une chose que j'ai toujours intégrée. Dans la vie d'un groupe, il y a parfois des vérités qu'il faut être capable de dire pour avancer donc moi c'est un coach qui m'a toujours fait avancer dans le sens où quand il considérait que ce que je faisais n'était pas dans le bon ton, il n'hésitait pas à me dire les choses en face. Puis à contrario, lorsque les choses étaient bien faites, il n'a jamais eu aucun problème à me le dire. Personnellement, ce type de coach me va parfaitement et la relation que j'ai eue avec lui était très bonne.
Tu as découvert la Ligue des Champions avec Paris. Quelles sont les émotions que l'on ressent lorsque l'on joue un tel match ?
Pour être honnête, sur le coup, pas grand chose. Parce que je suis arrivé au club à l'âge de 9 ans donc je l'ai vécu comme un match important du Paris Saint-Germain dans lequel il faut être très bon. Depuis l'âge de 9-10 ans j'étais habitué à vivre cette pression où il faut gagner. Peu importe où l'on se déplace, le PSG est aimé ou détesté mais en tout cas on ne laisse personne indifférent. J'étais habitué à vivre avec ça. C'est plutôt le lendemain, quand j'ai vu tous mes partenaires avec qui j'avais grandi en centre de formation ou dans mon quartier. Mes potes étaient super contents parce que ce qu'on entendait tous les mardis ou mercredis la musique de la Ligue des Champions et moi, j'avais eu la chance de le vivre. Sur le coup, je m'étais dit que c'était un match très important à gagner et j'étais forcément déçu parce qu'on n'était pas parvenu à le faire. Déjà être un jeune joueur qui joue avec l'équipe première, il y a ce sentiment d'appartenance pour les supporters. Puis quand tu joues la Ligue des Champions, c'est encore un autre cap de passé parce que forcément le regard des gens n'est plus le même.
Pourquoi ne t'es-tu pas imposé à Paris selon toi ?
Pour plusieurs raisons. Dans un premier temps parce que je n'ai pas été épargné par les blessures donc ce n'est pas évident de pouvoir trouver la continuité recherchée par n'importe quel joueur de haut niveau. Et puis, même si on parle de logique de concurrence, il faut accepter parfois que certains joueurs à l'instant T sont meilleurs que toi. C'est justement cette continuité qui te permet de réduire cet écart voire même de passer outre à terme. Pour ne citer qu'eux, il y avait année après année Mauricio Pochettino, Gabi Heinze, Fréd Dehu, José Pierre-Fanfan, David Rozehnal, Mario Yépès... Il y avait des joueurs de qualité qui étaient tous internationaux dans leur pays. Donc s'ils sont internationaux dans des pays qui représentent des places importantes dans le monde, ce n'est pas un hasard. J'ai pris ce que j'avais à prendre chez ces joueurs et j'ai accepté cette réalité que certains joueurs sont meilleurs que toi et surtout que j'étais sujet à de nombreuses blessures.
En tant que défenseur, quel est l'attaquant qui t'a le plus posé de problèmes ?
C'est une bonne question... En pro, il n'y en a pas un qui me vient comme ça. Certes il y avait des joueurs de qualités mais je n'en vois pas un qui m'a donné plus de mal qu'un autre. Mais en jeune, j'ai affronté Carlos Tévèz avec l'Equipe de France. On avait joué l'Angleterre et l'Argentine lors d'une triangulaire et je dirais Carlos Tévèz car il avait un mélange de tout : il est technique, robuste puis c'est un attaquant qui ne lâche rien. Ce n'est pas un fainéant ; il enchaîne beaucoup de courses, met beaucoup d'impact donc si tu n'es pas prêt à livrer un grand match, c'est compliqué surtout aussi jeune. En pro, quand tu as un adversaire de qualité cela surprend, mais pas tant qu'en jeune. Voir un mec aussi mature, aussi dur, aussi complet si jeune, surtout qu'il venait d'Amérique du Sud et qu'on ne connaissait que les Européens. J'ai affronté Torres mais c'était un Européen et là, c'était le premier test face à une équipe d'Amérique du Sud
Quel est ton meilleur souvenir sur un terrain ?
Pour moi, chaque fois que j'ai été sur un terrain foot a été un souvenir fort. J'a eu la chance de faire partie de deux groupes qui ont remporté la Coupe de France avec le Paris Saint-Germain : une contre Châteauroux et la deuxième face à l'Olympique de Marseille. Je me souviens aussi d'un match de Coupe de la Ligue contre l'OM où on est menés 2-0 au Vélodrome et finalement on s'impose 2-3. Pour moi, parisien, formé à Paris, qui n'a connu que ce club là depuis l'âge de 9 ans, ça a une dimension particulière. Il y a aussi l'Euro Espoirs avec l'Equipe de France où on arrive à éliminer les Anglais alors qu'on nous promettait l'enfer puis à atteindre les demi-finale. Je ne vais pas dire qu'on avait l'équipe pour gagner mais ça reste une aventure assez extraordinaire sur les trois ans qu'on a vécus ensemble. Ce sont plus les aventures de vestiaire qu'un match en particulier qui me revient comme ça quand il faut s'arrêter sur un souvenir type football.
Tu as joué en Equipe de France chez les jeunes, est-ce un regret de ne jamais avoir joué chez les A ?
Non, ce n'est pas un regret dans le sens où cela peut l'être si vous enchaînez les saisons dans un grand club et que vous vous estimez performant. Ce n'était pas mon cas car je jouais dans un grand club, certes, mais je ne faisais malheureusement pas des saisons à trente matchs. Les saisons que je faisais m'ont permis d'être international espoir. Les matchs que je faisais en sélection m'ont permis de pouvoir y rester. Maintenant, pour à mon sens pouvoir se considérer comme sélectionnable, il faut jouer dans un grand club et y être très performant sur la durée. Si ce n'est pas le cas, il n'y a pas de regret ni même de pensée concernant les A."
Je remercie Jean-Michel Badiane pour sa disponibilité, sa sympathie et ses réponses.
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